La construction de la maquette de « La Grande Hermine » a commencé par une étude approfondie des documents disponibles.

  • La lecture des livres : « Jacques Cartier » d’Yves Jacob ; « Voyages au Canada » de Jacques Cartier. (Relation de ces voyages racontée par lui)
  • Recherche sur Internet de toutes les informations disponibles, du plan le plus fiable sur la caraque « La Grande Hermine » .
  • A la bibliothèque du Musée National de la Marine, il y a un plan au 1/50 de ce bateau, et  le dessin de reconstitution d’un certain Monsieur Dinko Vodanovic de Montréal.

Le plan choisi et qui servira de base est celui de Monsieur Christian-Henri Tavard au 1/100, qui a fait une étude sérieuse sur ce navire.
( Article du MRB n° 255 )

Ne possédant pas de détails sur la « Grande Hermine », pour sa réalisation, il a fallu se documenter auprès d’une bibliographie importante concernant les navires des XV° et  XVI° siècles. Comme il n’existe malheureusement rien de la « Grande Hermine », on ne peut en avoir une idée qu’a travers des reconstitutions à échelle réduite.

Il existe cinq  reproductions à échelle réduite de la « Grande Hermine ». 

  • Une reconstitution du Musée Naval de Venise réalisée dans la première moitié du XIX°,
  • Une au musée du Donjon de Saint-Malo présentée sur un débris de bois de la « Petite Hermine »,
  • une reconstitution espagnole, une sur les plan de Dinko Vo  Danovic exposée au Musée de la marine de Montréal
  • la plus récente à la Maison du Québec à Saint-Malo, offerte par le gouvernement québécois à la ville de Saint-Malo, à l’occasion du 450 ème de la prise de possession du territoire appelé la Nouvelle France. Elle est l’œuvre de deux artisans québécois.
  • Enfin une reconstitution canadienne grandeur nature pour l’exposition internationale de Montréal de 1967 exposée à flot dans le parc historique national Cartier-Brébeuf situé dans une boucle de la rivière Saint-Charles : lieu historique puisque ce fut là que Jacques Cartier et son équipage hivernèrent entre fin 1535 et début 1536. Celle-ci fut détruite en 2001 pour raison de sécurité.

Au Manoir de Limoelou-Rothéneuf , l’ancienne demeure de J. Cartier devenue musée, il existe aussi la maquette d’une caraque très proche de la « Grande Hermine ».  Tout près de là, la petite chapelle de Rothéneuf garde le souvenir de la visite de l’explorateur avant son départ. Là se trouve une reproduction de la statue ND. de Rocamadour ramenée par J. Cartier lors de son pèlerinage d’action de grâce à Rocamadour en Quercy.

 

Voici en photo le lieu où avait mouillé la Grande Hermine avant le départ du deuxième voyage, près des tours de Saint-Servan à St Malo.

                           

 A la Cathédrale de Saint-Malo, repose le corps de Jacques Cartier, ainsi que le lieu où il a reçu avec son équipage la bénédiction de l’Evêque.

Les niveaux

Pour la réalisation de la maquette, une étude minutieuse des plans a été faite avec le choix d’une échelle au 1/50. Ont été étudiés : les dimensions et forme du navire, mesures et proportions des mâts, des vergues et des voiles, accastillage de l’époque, armement ( Les deux nefs de Jacques Cartier étaient armées d’une « bonne artillerie », sans doute des pierriers disposés sur les rambardes, servis par quatre canonniers, ainsi que de quarante arquebuses ), le canot de service.
La « Grande Hermine » comptait trois niveaux :

  • Le niveau A : pont principal
  • le niveau B occupé par le logement de l’aumônier, prêtre qui réconfortait les malades, du chirurgien et de l’écrivain.
  • le niveau C où dormaient les marins et où l’on faisait la cuisine ainsi que la cale, où se trouvaient les barils de marchandises.

Les indications n’étant pas suffisantes, par souci de rigueur et dans le désir d’aboutir le plus possible à une œuvre authentique, il a fallu recourir à plusieurs ouvrages spécialisés.

 

La peinture

La réalisation d’une élévation peinte, a été nécessaire pour l’étude des couleurs. En effet la coque était peinte en quatre couleurs. Les «œuvres-vives», sous la flottaison et jusqu’au liston longitudinal, étaient, suivant la tradition, goudronnées et donc noires.
Au-dessus des défenses longitudinales, les « œuvres-mortes » tangeant au plat-bord du pavois du pont principal. Toute la carène était peinte en brun-rouge ainsi que l’étrave et le taille-mer.
Les mâts et les vergues étaient aussi en brun-rouge avec les extrémités en rouge.
Les châteaux de proue et de poupe étaient blancs, avec le balcon de grand-chambre.
Les porte-haubans ainsi que les lisses des châteaux étaient rouge vif.
L’intérieur des pavois donnant sur le pont principal étaient blancs.
Les doubles portes sur les pavois étaient pour leur part peintes en rouge ainsi que quelques autres détails.

Les peintures utilisées ont été choisies avec soin.
Ce sont des peintures vinyliques, fines et légères ayant une très bonne adhérence, un pouvoir opacifiant élevé, une souplesse durable dans le temps, une excellente solidité à la lumière et aux agents atmosphériques. Elles possèdent un pouvoir couvrant allié à la vivacité et à la fraîcheur de leurs pigments. De plus, sous une forme moderne, cette peinture synthétique rappelle les célèbres « Tempéra » que les anciens maîtres préparaient avec le suc laiteux de certaines plantes.
Plusieurs couches de vernis satiné, appliquées selon une technique très soignée, donneront un aspect particulier à la finition.

 

Les essences de bois

Les essences de bois qui ont été utilisées pour la construction de la maquette de la « Grande Hermine » sont le tilleul, le cormier ou sorbier domestique, le poirier, le buis, le hêtre et le pin pour  les mâts et vergues.
Un bois coupé d’au moins trois hivers a déjà été choisi et préparé. Le tilleul était utilisé autrefois en ébénisterie pour la sculpture, le mobilier et les meubles peints, les sabots, la réalisation des retables dans les églises, ainsi que les boiseries des orgues. ( Touches de piano, instruments de musique ).

Le bois de tilleul, ou « Lipa » en Russe, est utilisé pour peindre les icônes, ainsi que la fabrication de jouets traditionnels.
Les masques des sarcophages du Fayoum (époque hellénique, en Egypte) étaient en tilleul, ce qui indique déjà dans les temps anciens un caractère sacré de ce bois.
Son utilisation courante dans les édifices religieux lui a valu le nom de « lignum sacrum », bois sacré, au Moyen-Age.
Son écorce fournit une fibre très solide servant à faire des cordages.
 Le bois de tilleul, facile à travailler, se découpe dans tous les plans. Il possède un beau blanc lisse, tendre, un grain très fin et compact. La fibre du bois de tilleul permet des débits de faible épaisseur et un cintrage à froid relativement simple.
Le bois de tilleul fait parti des essences à aubier et cœur non différencié et parfaitement imprégnable. Cette qualité a permis de le traiter facilement après sa mise en œuvre pour augmenter la dureté qui lui manque naturellement. 
Les fruitiers, tels le poirier, le cormier et buis, remarquables à travailler, ont été utilisés pour les pièces sculptées et tournées de petite taille.
Ce sont des bois de très haute qualité, dit précieux, aux fibres courtes et serrées prenant bien le tranchant de l’outil ; la coupe est franche et lisse.
Tout en étant facile à travailler, ces bois sont plus durs que le tilleul, offrant un très bel aspect. Acceptant facilement le polissage ce sont des bois dits « Auto-cirant », très recherchés par les ébénistes et les luthiers.
Leurs textures permettent, en modélisme, de reproduire par la finesse de leur grain, l’aspect du chêne à l’échelle.

 

La construction

La première étape de la construction a été de se procurer des plots de tilleul de qualité et le plus sec possible, ainsi que de cormier et sorbier. Il en a été de même pour les autres essences.
Déligner les plots et les dégauchir, les raboter pour pouvoir travailler au débit des différentes pièces du bateau. 
La méthode utilisée pour cette maquette consista à bâtir le « squelette » de la coque, par la reproduction des formes de la quille en tilleul avec des couples en contre-plaqué. Cette maquette n’ayant pas de vue intérieure, il ne fut pas nécessaire de faire un montage traditionnel des couples 

Sur cet ensemble quille et couples ont été mis en place, la poupe et l’étrave mis en forme dans des blocs de tilleul.

Sur cet ensemble couple et étrave furent montés les bordés en tilleul préalablement débités dans des plots.


Le pont a été ensuite réalisé avec un placage d’orme.
Les lisses et défenses de bordés posées en tilleul.

Les caillebotis, les bittes, les bittons, guindeaux,  clair-voix, rambardes tournées et chaque élément de l’accastillage selon les plans ( poulies, caps de mouton ) ont été réalisés en poirier, noyer et buis.
Les mats, vergues, beaupré, perroquet de beaupré et bout-dehors ont été préparés en hêtre et pin. La hune a été travaillée cormier avec une partie en métal peint.

Les voiles ont été découpées et taillées dans du coton d’une trame la plus proche de l’échelle.

La voilure se compose de six voiles réparties sur cinq mâts, dont quatre verticaux étayés sur haubans, beaupré, mat de misaine, grand mat, mat d’artimon et tap cul.
Un soin tout particulier a été apporté à la réalisation de l’armement dans le respect du 16ème siècle, avec congréage et fourrure des cordages. Le choix de ces cordages se fera en  coton dans le respect de l’échelle. L’esthétique du modèle étant en relation étroite avec ce choix ainsi que de la qualité des poulies et caps-de-moutons. Il faudra compter entre 300 à 500 poulies et 100 à 150 cabillots.
Le capelage et l’aiguilletage des haubans, les enfléchures furent faits avec soin dans les mêmes soucis d’esthétique.
L’ensemble des cordages a été teinté, brûlé à la lampe à alcool et passé à la cire d’abeille.
Les parties métalliques sont en fil et plaques de laiton. Le fanal de poupe en laiton.
L’équipement d’armement est composé de quatre pierriers en laiton.(Petits canons de pavois sur fourche).
Une embarcation ou grand canot avec ses avirons et ses voiles a été installé sur le pont principal au-dessus du caillebotis central.

La décoration du château arrière a été composée après une recherche des armoiries de François Ier.
Cette décoration a été composée par moi-même en fonction de l’histoire du bateau et de sa mission, n’ayant aucune information sur l’originale.

Les différentes voiles après couture et pose des ralingues ont été montées avec les cargues et leurs drisses de garcette, puis mises en forme.

Enfin, flammes et pavillons furent à confectionner et monter après recherche d’éléments héraldiques sur internet :

  • Pavillon de France sur grand mat
  • Flamme Royale de François 1er sur grand mat.
  • Pavillon Maritime de France sur mat de misaine.
  • Flamme de Bretagne sur mat d’artimon monté en bout de voile latine.

Ma formation d’esthéticien industriel à l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Appliqués et Métiers d’Art de Paris, le savoir-faire dû à mon expérience de la maquette navale, le goût de l’authenticité et du travail bien fait, mon « coup de patte » confèrent à cette maquette ex-voto une qualité et un charme particuliers.


La « Grande Hermine » arrivant à Stadaconé

 

Les dimensions de coque hors tout sont les suivantes :

  • longueur : 73 cm
  • largeur    : 18 cm

Encombrement de la maquette hors tout :

  • longueur :  100 cm
  • hauteur   :  88 cm
  • largeur    :  jusqu’à  45 cm voiles établies

Echelle :   1/50     Coque peinte et armement dans le plus grand respect du 16ème siècle.

Caractéristiques de la Grande Hermine :
L : 36,10 m entre les extrémités des châteaux de proue et de poupe
L à la flottaison : 26,30 m
L au maître beau : 8,60 m
H totale de la quille à la pomme du grand mât : 38 m
Tirant d’eau : environ 3,5 m
Déplacement : 280 à 290 tonneaux.


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